La crise de la dette grecque : Quel effet aura-t-elle sur la zone euro ?

La dette grecque est un problème pour toute l’Europe après la victoire électorale du parti d’extrême gauche Syriza et le retour en arrière des mesures d’austérité. La question de la dette de la Grèce est sur toutes les lèvres après la victoire électorale de Syriza et l’élection consécutive de son représentant, Alexis Tsipras, au poste de Premier ministre. Comment en est-on arrivé au point d’effrayer les pays de la zone euro ?

La Grèce n’a jamais vraiment eu de gouvernement stable et constitutionnel. Depuis 1830, la dette publique n’a cessé d’augmenter pour atteindre son niveau actuel de 321 milliards d’euros, soit 175 % du PIB. Bien que la Grèce ait été placée sous la supervision de la Troïka en mars 2012 (composée de représentants du Fonds monétaire international, de la Banque centrale européenne et de la Commission européenne), elle a pu bénéficier d’une réorganisation qui lui a permis d’éliminer 100 milliards d’euros de dette et de prolonger la période pendant laquelle elle doit rembourser les prêts. Malgré cela, elle a continué à augmenter après une petite baisse en 2012, et le pays connaît aujourd’hui une crise sociale comme il n’en a jamais connu. La « crise de la dette grecque » fait l’objet de nombreux débats.

La question est de nature à la fois économique et politique

La question dépasse la sphère économique et entre dans la sphère politique pour un certain nombre de raisons. Avant la restructuration, la Grèce était détenue à 57 % par des créanciers privés. Maintenant, les prêteurs internationaux, y compris les banques et les contribuables des pays de la zone euro, détiennent un total de 53 milliards d’euros dans ses avoirs. Et le Fonds pour l’amélioration mutuelle dispose de 32 milliards, la Banque des règlements internationaux de 27 milliards et le Fonds européen de stabilité financière de 141,8 milliards. Le problème est que les caisses des gouvernements sont vides et que la croissance économique ralentit, laissant ces investisseurs craindre qu’ils ne seraient jamais remboursés. En Europe, tous les regards sont tournés vers la Grèce, les marchés financiers exerçant une pression sur la zone euro. La situation sociale du pays est également très mauvaise en ce moment. Selon Politis.fr, le PIB du pays n’a cessé de chuter, passant d’un maximum de 237,42 milliards d’euros fin 2009 à un minimum de 178,8 milliards d’euros à la fin du troisième trimestre 2014. Une chute de 25 % depuis le début de la crise financière dans la zone euro, la Grèce recevant encore de l’aide. La production industrielle a chuté de 30 % et les exportations ont diminué d’autant. Le pays n’a pas bien réagi aux mesures d’austérité, et il n’est pas exclu que le peuple grec se tourne vers des orientations politiques plus radicales comme l’extrême droite, qui a gagné beaucoup de terrain ces dernières années. Cette situation inquiète non seulement les voisins de la Grèce en Europe, mais aussi leurs dirigeants politiques.

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Inquiétudes pour la zone euro, ou « risques » ? Une maladie infectieuse !

Lorsqu’on parle de la Grèce, on utilise souvent l’expression « mauvais élève de l’Europe« . Un étudiant mécontent, une influence négative, peut-être ? Si une remise de dette est offerte, d’autres nations lourdement endettées, comme le Portugal, l’Italie ou l’Espagne (où le « parti populaire » Podemos est de plus en plus populaire), exigeront la même chose. Ces mêmes Espagne et Italie qui ont prêté des dizaines de milliards d’euros à la Grèce. L’ex-ministre et actuel directeur de la fondation Res Publica, Jean-Pierre Chevènement, a déclaré : « C’est un problème européen et ce n’est qu’accessoirement un problème grec : une telle secousse politique aurait pu se produire en Espagne, au Portugal, ou ailleurs. »

Possible annulation de la dette et sortie de la zone euro ?

La presse allemande et la chancelière Angela Merkel ont exercé une pression intense sur la Grèce pour l’empêcher de revenir sur ses engagements avant les récentes élections législatives du pays. En effet, le 5 janvier, le journal allemand Der Spiegel a écrit sur son site internet, citant « des sources proches du gouvernement allemand », que « Le gouvernement allemand juge quasiment inévitable une sortie de la Grèce de la zone euro », si le leader de l’opposition Alexis Tsipras dirige le gouvernement après les élections et abandonne la ligne de rigueur budgétaire et ne rembourse plus les dettes du pays. D’autres, dont l’économiste Charles Wyplosz, y ont vu une tentative de la chancelière d’influencer le résultat des élections. Nous savons maintenant que cette stratégie a échoué lamentablement si tel était le résultat escompté. Après les élections, il semble qu’Alexis Tsipras s’attachera à renégocier et à remodeler la dette publique de la Grèce avec ses voisins et ses créanciers en Europe plutôt que de renoncer à ses engagements. Cependant, la stabilité de la situation est précaire, et l’inquiétude des États de ne jamais être remboursés s’est manifestée par une dangereuse volatilité des marchés. Une forte pression s’exerce sur les pays de la zone euro pour qu’ils remplissent leurs obligations, alors quand un ou deux d’entre eux menacent d’effacer entièrement leur dette, cela provoque une panique générale. Par exemple, à l’annonce de la possibilité que la Grèce quitte la zone euro, le CAC 40 a fortement chuté sur les principaux centres financiers européens, avec des pertes de 3,31 % à Paris, de 3,45 % à Madrid, de 4,92 % à Rome et de 5,63 % à Athènes.

Le véritable coût de la dette grecque : deux versions différentes

Selon Philippe Gudin, économiste chez Barclays Capital : en matière d’accidents en Grèce, nous ne sommes pas vraiment à l’abri. L’économiste prédit une fuite des capitaux si la dette grecque n’est pas remboursée par Alexis Tsipras, une baisse des investissements et de la consommation, et un grave ralentissement économique. Et la seule façon de s’en sortir sera de quitter l’euro pour dévaluer « . Il convient donc d’être très prudent dans la réalisation de cette renégociation de la dette afin de ne pas compromettre la sortie de la zone précitée. Par ailleurs, des experts contactés par Le Monde, comme Thibault Mercier, spécialiste pays chez BNP Paribas, et Jesus Castillo, chez Natixis, affirment que la dette est soutenable d’un point de vue purement théorique grâce à l’effort d’austérité qui a permis de stabiliser la dette à son niveau actuel et à Bruxelles de s’entendre sur un excédent primaire de 4,1% cette année. Mais en pratique, cela impliquerait de consacrer tout l’excédent budgétaire du pays à la dette, ce qui est intenable, et qui n’est pas dans les plans de Syriza. D’un autre côté, on pourrait citer Mathieu Pigasse, D-G de la banque Lazard et chargé de conseiller le gouvernement grec, qui affirme qu' »une annulation de la dette grecque n’aurait aucun impact sur les impôts français. » Par exemple, si les Grecs annulent leur dette, le gouvernement français affirme que chaque citoyen devrait contribuer à hauteur de 731 € d’impôts supplémentaires pour compenser l’annulation des 40 milliards d’euros que la France a théoriquement prêtés à la Grèce. Mathieu Pigasse et André Grjebine, directeur de recherche à Sciences Po, répondent tous deux que l’opinion publique n’est pas favorable à l’aide à la Grèce, et que cette aide n’est ni nécessaire ni obligatoire en raison des mesures déjà en place pour atténuer de telles crises. Ils précisent notamment qu’il est d’usage de réemprunter sur le marché lorsque les dettes du Trésor arrivent à échéance, annulant ainsi l’effet de l’annulation de la dette sur le budget.

Quelles sont les options disponibles pour la Grèce ?

Conduite dans une position sociale plus que difficile par une politique d’austérité inefficace, la Grèce doit maintenant évaluer les options qui s’offrent à elle suite à la victoire de Syriza. Créer des engagements perpétuels indexés sur la croissance du pays, comme le propose le nouveau gouvernement grec, est une mesure que Jean-Pierre Chevènement et Jean Tramuset désapprouvent. Pour que la Grèce et la zone euro puissent enfin échapper au fardeau de leur dette, il faut mettre au point la « recette parfaite ».