Le marché français des lunettes est monopolisé par un petit groupe d’entrepreneurs

En France, les lunettes peuvent coûter plus de 470 € pour une seule paire (verres et verres correcteurs compris). Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que 75 % des Français trouvent le prix des lunettes de soleil trop élevé. La France est le pays européen où l’achat de lunettes est le plus coûteux. Qui est responsable de la facture ? Les clients et leurs alliés de la santé ?

Un marché étroitement réglementé avec seulement quelques acteurs majeurs

Un petit groupe d’acteurs capables de communiquer efficacement a accaparé le marché de l’optique et semble s’être mis d’accord pour partager équitablement le gâteau (sans que l’on sache si ce consensus est réel). En conséquence, Essilor détient un quasi-monopole sur le marché français de la lunetterie. Afin de maintenir sa position dominante (quasi-délirante) sur le marché français, l’entreprise a progressivement acquis ses concurrents par une stratégie de croissance externe. De plus, les sociétés italiennes Luxottica et Safilo se partagent la majorité des licences de marques de lunettes de soleil, ce qui leur permet de se partager le marché français et de fournir la majorité des lunettes de soleil portées par les Français. En outre, ces articles très demandés ne sont disponibles que dans les grandes chaînes de magasins d’optique. Quelques entreprises seulement contrôlent la grande majorité des 11 000 points de vente du marché français de l’optique. Lorsque la moitié de la population porte des lunettes et que 13 millions de paires sont achetées chaque année, ce « cartel » a un effet significatif sur l’économie.

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L’arrivée de plusieurs nouveaux venus affamés

Marc Simoncini, qui a fondé le détaillant de lunettes en ligne Sensee en 2011, n’a cessé de critiquer l’état actuel de l’industrie optique. Selon la mission affichée de l’entreprise, ses lunettes coûteraient deux fois moins cher que celles vendues en magasin dans toute la France. La réduction des dépenses liées à la distribution physique des pièces permettra d’atteindre cet objectif. Cependant, les nouveaux acteurs du secteur de l’optique peinent à s’implanter sur le marché. Ils se plaignent notamment de la manière dont les fournisseurs privilégient les acteurs historiques du secteur. En effet, Essilor ne semble pas avoir décidé de livrer des lunettes à Sensee, peut-être par crainte de voir ses relations avec ses partenaires de longue date se détériorer. De même, Safilo ne veut pas donner de lunettes à Sensee. Il est donc difficile pour Sensee de tenir sa promesse de fournir à ses clients les mêmes produits que ceux qui sont disponibles en magasin. Une étude menée par le cabinet Altermind à la demande de Marc Simoncini montre qu’une évolution du marché français de la lunette pourrait permettre aux acheteurs de réaliser d’importantes économies. L’étude montre qu’Essilor est réticent à fournir des distributeurs « low cost », car cela réduirait les marges bénéficiaires de l’entreprise sur ses autres canaux de distribution, qui restent sa principale source de revenus.

L’Autorité de Concurrence mène une enquête

L’Autorité de Concurrence mène actuellement une enquête sur le secteur de l’optique. Cette même instance avait déjà condamné en 2002 un groupe d’opticiens lyonnais qui avaient conspiré pour éliminer un rival qui vendait des lunettes moins chères. C’est pourquoi les entreprises désireuses de se lancer sur le marché de l’optique surveillent de près les résultats de l’enquête de l’Autorité. Peut-on espérer que le secteur de l’optique se calme ?